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Un comportement évolue vers l’addiction

Édition n° 130
Mars. 2021
Addictions comportementales

Leitartikel. Faire des achats sur Internet, jouer en ligne avec des amis ou parier sur son équipe favorite procure du plaisir et est distrayant. La plupart des personnes apprécient ces activités et connaissent leurs limites – mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Lorsqu’un plaisir ou une passion donne lieu à un comportement excessif, Internet, les achats ou les jeux d’argent peuvent devenir une addiction.

Définition

Qu’est-ce qu’une addiction comportementale  Formuler une définition n’est pas si simple. Une personne qui joue chaque semaine au casino, passe six heures par jour à jouer à la Playstation ou aime beaucoup acheter des vêtements sur Internet est-elle dépendante  Une addiction comportementale se caractérise par le fait qu’une chose qui faisait auparavant partie du quotidien occupe subitement une place prépondérante  la vie de la personne touchée tourne de plus en plus autour de l’objet de la dépendance, si bien qu’elle néglige ses amis, sa famille et son travail. Un besoin irrépressible s’installe, il en faut toujours plus. La personne ne peut plus s’arrêter, même si son compte en banque est vide depuis longtemps.

Les addictions comportementales ne sont pas liées à une substance psychoactive, comme c’est le cas de l’alcoolisme ou du tabagisme, mais à une activité. Une autre différence avec les dépendances à une substance réside dans le fait que certaines addictions comportementales sont moins stigmatisées. On peut ainsi devenir accro au travail sans que, souvent, cette dépendance soit perçue par la société comme une addiction comportementale. 

D’un autre côté, les points communs entre ces deux types d’addiction sont nombreux. Le schéma comportemental des personnes touchées est similaire et les processus biochimiques cérébraux en jeu sont comparables. Les causes de l’apparition d’une dépendance sont aussi souvent analogues, puisque les comportements aident certaines personnes à refouler des sentiments désagréables comme la peur ou le stress. Dernier point  seule une minorité des personnes touchées se fait aider.

Les addictions comportementales prennent une place toujours plus grande dans la problématique des dépendances en Suisse. L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) se concentre actuellement sur l’utilisation problématique des jeux d’argent et des jeux vidéo, du cybersexe et des réseaux sociaux. Très présentes, ces pratiques ont un potentiel addictif jugé important. Mais le plus épineux reste de faire preuve de discernement dans le diagnostic posé. Il s’agit d’éviter que des personnes qui s’adonnent à une activité ou ont un certain comportement par passion soient considérées trop hâtivement et à tort comme malades.

Un phénomène non isolé

Les addictions comportementales ne sont pas un phénomène isolé. Dans de nombreux cas, de telles dépendances s’accompagnent de troubles psychiques comme des troubles du sommeil, une dépression ou des troubles de la personnalité. Mais d’autres relations sont également observées  souvent, les personnes accros aux jeux vidéo en ligne ont une activité physique insuffisante et se nourrissent mal. Une consommation d’alcool, de cannabis ou de tabac entre aussi en jeu chez certaines personnes dépendantes aux jeux d’argent. 

S’agissant de l’égalité des chances, les chiffres montrent que les personnes avec un faible niveau de formation présentent un risque plus élevé de développer une addiction comportementale. On compte ainsi près de deux fois plus de personnes avec un faible niveau de formation parmi les gamers en ligne à risque. 

Le sexe joue aussi un rôle. Même si on suppose que les addictions comportementales sont globalement aussi fréquentes chez l’homme que chez la femme, les femmes ont plutôt un comportement excessif face aux réseaux sociaux tandis que les hommes se montrent plutôt excessifs en matière de jeux vidéo en ligne. Les hommes sont néanmoins plus nombreux que les femmes à suivre une thérapie. 

Face aux addictions comportementales, l’OFSP considère que son rôle est d’intervenir principalement dans trois domaines  la recherche, le monitorage et la coordination des mesures préventives.

Recherche

La recherche fondamentale doit contribuer à élargir les connaissances disponibles sur les addictions comportementales. À cette fin, l’OFSP a lancé une étude visant à établir un état des lieux. Les discussions portent notamment sur le moment à partir duquel un individu doit être considéré comme présentant une addiction comportementale. L’étude doit mettre en lumière les échelles de mesure à utiliser pour qualifier un comportement de problématique ou de pathologique. Il s’agit en outre de tenter de classer les multiples termes utilisés pour décrire les addictions comportementales et d’établir des délimitations terminologiques. Parlons-nous par exemple de jeux de hasard ou de jeux d’argent  Existe-t-il une cyberaddiction ou une utilisation problématique d’Internet, ou Internet est-il simplement un média supplémentaire par lequel se manifestent des addictions comportementales  

La Classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes (CIM) offre une première aide pour s’y retrouver dans la terminologie et la sévérité des addictions comportementales. Ce système de classification des diagnostics médicaux internationalement reconnu décrira dès 2022 le gambling disorder (trouble lié aux jeux d’argent), mais aussi le gaming disorder (trouble lié aux jeux vidéo) comme des tableaux cliniques indépendants. La plupart des autres addictions comportementales ne sont pas définies dans la CIM à ce jour. Il est d’autant plus important de disposer d’une terminologie claire et d’échelles de mesure.

Monitorage

Concernant le monitorage, il s’agit de surveiller la prévalence et l’évolution des différentes addictions comportementales sur une période prolongée  ces addictions augmentent-elles  Combien de personnes présentent un comportement problématique en matière de jeux d’argent  Le système de monitorage des addictions et des maladies non transmissibles de l’OFSP (Mon­AM) fournit des chiffres et des faits pour décrire certaines addictions comportementales et permet un suivi dans le temps.

Coordination des mesures

En ce qui concerne la coordination, l’OFSP travaille en collaboration avec différents partenaires du secteur des addictions. La coordination du travail avec les partenaires joue un rôle important dans le cadre de la stratégie Addictions. Les échanges avec ces acteurs permettent à l’OFSP de rapidement intégrer les nouvelles données dans d’autres activités de recherche. De plus, le Parlement a chargé l’OFSP de surveiller l’évolution de l’utilisation problématique d’Internet en Suisse. L’OFSP est aidé dans cette tâche par le groupe d’experts dans le domaine de la cyberaddiction. La coordination des échanges entre les membres du groupe a été confiée par l’OFSP au Fachverband Sucht et au Groupement romand d’études des addictions (GREA). Dans le rapport de synthèse sur la cyberaddiction qu’ils ont publié récemment, les experts se montrent unanimes  les personnes ne souffrent pas d’une addiction à Internet à proprement parler, mais l’Internet devient un moyen pour répondre à leur addiction. Utiliser Internet est un moyen de satisfaire son addiction.

Cela montre aussi qu’il est essentiel de mieux connaître les addictions comportementales afin qu’à l’avenir, nous soyons non seulement en mesure de faire encore plus clairement la différence entre passion et dépendance, mais aussi de proposer des conseils et une thérapie aux personnes qui présentent une addiction comportementale.

Liens

Contact

Angelina Vangopoulou
section Stratégies de prévention 


Wally Achtermann
section Bases scientifiques 
 

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