Leçons tirées des expériences faites avec l’alcool et le tabac

Bien que les produits cannabiques se distinguent de l’alcool et du tabac et qu’ils soient utilisés de manière très variée, les connaissances fondamentales acquises dans le cadre de la régulation de l’alcool et du tabac peuvent être appliquées à la régulation du cannabis. C’est la conclusion d’une revue systématique de la littérature réalisée par l’Université de Nouvelle-Galles du Sud (Australie) sur mandat de l’OFSP *1.

L’étude examine huit mesures structurelles dans le domaine de l’alcool et du tabac qui ont pour but de prévenir une consommation de substances à risque, de réduire les dommages chez les consommateurs et de protéger les mineurs. Les mesures visant à augmenter le prix des produits, telles que les taxes d’incitation, les impôts ou les prix minimaux, font partie des moyens les plus efficaces pour réduire la consommation de stupéfiants. Elles peuvent également être modulées en fonction des catégories de produits, afin de favoriser le passage des produits à risque élevé aux produits à faible risque (des produits à fumer aux produits à vaporiser ou à avaler p. ex.).

Outre les mesures portant sur les prix, les mesures contre le tabagisme passif ont également fait leurs preuves, telle que la limitation de la consommation à certains endroits, qui réduit à la fois la consommation et les dommages causés à des tiers. Les interdictions complètes de la publicité et la limitation de la disponibilité (p. ex. en réduisant le nombre de points de vente ou les heures d’ouverture) agissent également sur la consommation légale de substances addictives. Ces mesures structurelles sont plus efficaces que les mesures visant à influencer le comportement (telles que les campagnes de prévention).

Des mesures préventives effi- caces peuvent également être adoptées dans le domaine de la protection de la jeunesse. En dehors de l’interdiction de vente aux mineurs, la prohibition des additifs aromatisés, des édulcorants et des autres substances qui séduisent les jeunes porte ses fruits. De telles mesures ne fonctionnent toutefois que si leur application est contrôlée, par des achats tests pouvant entraîner des retraits de licence par exemple.

En comparaison européenne, la Suisse est bien moins restrictive que d’autres pays dans le domaine du tabac et de l’alcool et ne fait guère usage des mesures structurelles mentionnées. Du point de vue de la santé publique, une réorientation de la politique du cannabis avec un accès légal mais strictement réglementé aux produits cannabiques contrôlés offre une chance unique de faire mieux, en tenant compte des principaux enseignements tirés de la réglementation sur les substances addictives légales.