Check-up de la lutte contre les pandémies en Suisse
Nov.. 2010Évaluation d’impact sur la santé
Évaluations. Deux expertises sur le dispositif de lutte contre la pandémie due au virus H1N1 («grippe porcine») attestent du grand engagement des acteurs responsables lors de la gestion de crise tout en révélant un potentiel d’amélioration.
Les deux évaluations confiées à des expert-e-s externes portaient sur la stratégie suisse de vaccination H1N1 et sur l’organisation de crise au sein de l’OFSP pendant la gestion de la crise en lien avec la pandémie H1N1 entre mars 2009 et février 2010. L’objectif des évaluations était de formuler des propositions permettant d’optimiser les futures stratégies de vaccination en cas de crise et la gestion de crise au sein de l’OFSP, et d’émettre des recommandations relatives à la Loi sur les épidémies en cours de révision et actuellement soumise à consultation.
Évaluation de la stratégie de vaccination: les pandémies exigent un pilotage central fort
L’évaluation de la stratégie suisse de vaccination avait pour but d’examiner les aspects suivants de la vaccination: planification, achat, autorisation, livraison, distribution, exécution et recyclage ou retrait. Les expert-e-s parviennent à la conclusion que les autorités suisses ont, dans l’ensemble, bien géré les événements. Les nombreuses difficultés rencontrées ont également été signalées par d’autres pays européens.
Pour les évaluateurs, le problème majeur rencontré dans le cadre de la pandémie H1N1 a été le manque de coordination et d’harmonisation des plans de pandémie cantonaux et nationaux. Ils suggèrent donc de confier à la Confédération la compétence de définir et de garantir l’harmonisation des éléments essentiels des plans de pandémie et leur mise en œuvre dans tout le pays. Il s’agit notamment de contrôler un dispositif standardisé de distribution des vaccins des stocks centraux vers les cantons. Il conviendrait en outre d’intégrer dans les plans de pandémie des scénarios différents en fonction des degrés de gravité de la pandémie. L’étude suggère également d’exercer régulièrement, en période pré-pandémique, les processus essentiels en cas de crise. Les expert-e-s recommandent de tenir dorénavant davantage compte, au moment du choix des vaccins, de la commodité du circuit réglementaire. De plus, un échange de données entre l’autorité de régulation suisse Swissmedic, et d’autres autorités d’homologation importantes (p. ex. l’Agence européenne des médicaments EMEA) simplifierait et accélérerait sensiblement la procédure d’autorisation; ce qui est primordial en situation d’urgence.
Pour améliorer la communication en cas de crise, les auteur-e-s recommandent d’intégrer au plan de pandémie global une stratégie de communication désignant un-e responsable qui assumerait la conduite de la communication dans la Suisse entière et coordonne la communication avec tous/toutes les intervenant-e-s.
La révision de la Loi sur les épidémies devrait, dans l’ensemble, renforcer la position de la Confédération et créer ainsi les conditions d’une stratégie de vaccination efficace et efficiente. L’actuelle loi ne fournit pas aux autorités fédérales la base légale nécessaire pour préparer et superviser une riposte coordonnée et cohérente à une grippe pandémique avant que celle-ci n’atteigne un stade critique. Dans la plupart des cas, il est alors trop tard.
Évaluation de l’organisation des processus au sein de l’OFSP pendant la gestion de crise: mettre en place une organisation de l’ombre déjà en temps normal
L’évaluation de l’organisation de crise interne à l’OFSP arrive à la conclusion que les collaboratrices et les collaborateurs de l’OFSP ont fait preuve d’un grand engagement et de beaucoup de souplesse dans la gestion de la crise et qu’ils/elles ont su tirer profit des expériences des crises antérieures. Les lacunes constatées concernent essentiellement la planification et la mise en œuvre logique et systématique de l’organisation de la gestion de crise de l’OFSP. Les expert-e-s recommandent donc de mettre en place en temps normal déjà une organisation de l’ombre afin que celle-ci puisse être rapidement activée en temps de crise. Il faudra pour cela créer des profils d’exigences pour les différentes fonctions de crise et recruter et former les collaborateurs et collaboratrices conformément à ces profils. L’étude suggère aussi d’opérer une séparation plus nette entre responsabilité technique et responsabilité en matière de processus. La gestion de crise en lien avec le virus H1N1 a été dans un premier temps considérée trop exclusivement comme un problème médico-scientifique plutôt qu’un défi organisationnel, ce qui a conduit à des changements de personnel au milieu de la crise.
Les manuels de crise de l’OFSP et de l’unité de direction Santé publique offrent des approches et des instruments importants pour la gestion de crise, mais, ils ont trop peu été intégrés à l’organisation et ont donc été insuffisamment utilisés. La conception d’un manuel de crise sous la forme de processus de développement organisationnel impliquant tous/toutes les participant-e-s augmenterait sensiblement son acceptation et son utilisation.
Pour l’OFSP, la conclusion des deux évaluations est la suivante: il faut remanier la Loi sur les épidémies au sens d’un renforcement des compétences de la Confédération en cas de (menace de) pandémie, revoir le plan de pandémie suisse et repenser la gestion de crise ainsi que les manuels de crise de l’OFSP en tant que processus de développement organisationnel. Beaucoup de ces remaniements ont déjà été pris en main. Enfin, il faut exercer régulièrement les éléments essentiels de la gestion de crise avant de se trouver dans une situation de crise.
Contact
Eva Bruhin, Évaluation et recherche, eva.bruhin@bag.admin.ch